Texte transmis par Mr Maurice Miquel du CGSA | ||
Quand un ingénieur Aveyronnais se penchait sur les crues de la Somme(d’après le dossier de Jean-Charles de Sambucy aux Archives Nationales)
En 1798, Jean-Charles de Sambucy est un très jeune et très brillant ingénieur des Ponts et Chaussées. Originaire de Saint-Georges-de-Luzençon, il a effectué toutes ses études supérieures techniques à Paris, au plus fort de la Révolution. Son père, l’aristocrate Jean-Baptiste de Sambucy, n’ayant pas émigré, n’a pas été trop ennuyé, de même que son fils, bien que jeune noble. Ils y perdent simplement un temps la particule.
Pendant toute sa scolarité, Jean-Charles de Sambucy est reconnu comme un sujet très doué, sérieux, appliqué, compétent et qualifié. Ses deux premiers postes, à Rodez en 1794 et à Annecy l’année suivante, confirment ces qualités. Au point que le ministère lui demande de reprendre des études encore plus approfondies, notamment en matière hydraulique. La direction Nationale des Ponts et Chaussées a en vue pour lui un poste délicat dans le département de la Somme, afin de mieux réguler les eaux de la rivière du même nom .
En mars 1798, Jean-Charles de Sambucy parvient à Amiens, aux ordres de l’ingénieur en chef du département. Il est destiné, avec obligation de résidence, au secteur très sensible d’Abbeville/Saint-Valéry, c’est-à-dire à l’embouchure de ce petit fleuve côtier qu’est la Somme. S’il doit aussi s’occuper de la voirie de ce territoire, son attention doit en priorité s’exercer sur la Somme.
Le nouvel ingénieur note « que l’étude des débits de ce cours d’eau et de la protection de ses crues exigera de longues années d’observations variées ». D’emblée, il trouve des localités ou des quartiers sur des terrains très tourbeux, donc marécageux, trop proches de la rivière. Il songe à l’édification de digues. Il s’y attache.
A l’embouchure proprement dite, il se penche très attentivement et longuement sur une meilleure connaissance des mouvements de la mer, des variations des marées, de la direction des vents. Simultanément il se documente sur les plus importantes inondations de la Somme. Au XVIIIème siècle, il relève « les folies » de la Somme en 1716, 1718, 1784, soit plusieurs dans le siècle et deux très rapprochées. Et ne parlons pas de la fameuse crue « millénaire » en 1658 qui inonda les deux tiers d’Abbeville, « avec une notable perte de biens de ses habitants ».
L’ingénieur spécialiste n’est pas sans savoir que la Somme, à son origine dans l’Aisne, suit la même rigole que l’Oise prenant naissance dans le même bassin, avec parfois de curieuses et importantes vidanges naturelles de nappes pouvant influencer brutalement le débit de la Somme, avec un long étalement de ses eaux sur ses rives. Jean-Charles de Sambucy voudrait canaliser le Somme pour mieux la contenir, de Saint-Valéry à Abbeville et jusqu’à la mer. Il lance un projet qui ne sera réalisé que plus tard, en 1835.
Pour un plus grand développement économique de la région, Jean-Charles se préoccupe beaucoup d’une bien meilleure navigation sur la Somme. Il préconise et réalise un nouveau chemin de hallage depuis Amiens jusqu’à Abbeville. Il s’investit avec ténacité pour deux importantes écluses à Picquigny et Saint-Valéry, « écluses doubles à deux portes soutenant les eaux à deux niveaux », ce qui est nouveau.
Jean-Charles de Sambucy a une excellente réputation. Des préfets et ingénieurs en chef départementaux voudraient se l’attacher. Lui-même, toujours célibataire, désirerait se rapprocher de ses vieux parents à Saint-Georges. Deux postes lui sont offerts en Corrèze et dans le Tarn. Mais des pressions très fortes font qu’il demeure dans la Somme, avec un congé pour retrouver un peu sa famille. Son action est même portée à l’attention particulière de Napoléon.Il lui faudra encore attendre quelques années son transfert à Rodez, en 1810, avant que Napoléon ne l’envoie en Italie auprès de sa sœur Elisa qui sollicite un ingénieur de grande qualitépour ses possessions Italiennes. Là, elle lui fera épouser une nièce de son mari, une sémillante Corse, jeune veuve d’un fringant colonel tué au combat. Mais là est une autre histoire !
Texte relevé sur
la Revue du Rouergue N° 66 de l’été 2001, avec autorisation de
l’auteur |
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